Les Liaisons dangereuses

Pierre Choderlos de Laclos est un général et écrivain français. Né en 1741, il entre à l’âge de dix-huit ans au corps royal du génie. Après quelques allers-retours entre la tribune et le canon, il meurt à Tarente en 1803 à la tête d’une brigade d’artillerie.

Militaire en temps de paix, le chevalier de Laclos trompe l’ennui par la littérature. Il lit beaucoup. Il écrit. Avec talent. Ses premières œuvres ne rencontrent aucun succès jusqu’à la publication des Liaisons dangereuses en 1782. Qualifié de « tableau de la plus odieuse immoralité », le roman propulse son auteur sur le devant de la scène littéraire et associe à jamais son nom au libertinage pervers d’un régime finissant. Bien qu’officiellement condamné, ce n’est pas le roman mais un essai très critique sur l’influence du génie de Vauban qui provoque son « exil » à Toul. Il y rencontre un familier du duc d’Orléans dont il devient secrétaire en 1789.

Cet emploi lui vaut de rencontrer tous les futurs grands hommes de La Révolution, de Mirabeau à Talleyrand. Devenu intime du prince, il est l’un des principaux instigateurs de la politique de la Maison d’Orléans qui tente alors d’obtenir la déchéance de Louis XVI et la régence du royaume. En juillet 1791, il entre au club des Jacobins ; il en est un des orateurs les plus en vue. Passionnément démocrate, il est le premier à lancer l’idée de l’assistance judiciaire gratuite. Nommé commissaire auprès de l’armée de Luckner (août 1791), sa réorganisation de l’artillerie est déterminante dans la victoire de Valmy remportée par Dumouriez. Promu général et nommé chef d’état-major de l’armée des Pyrénées, il est arrêté en mars 1793, suite à la trahison de Dumouriez ; puis libéré pour expérimenter avec succès un boulet creux de son invention ; puis arrêté de nouveau, après la chute du duc d’Orléans. Laclos ne retrouve la liberté qu’après la mort de Robespierre. Il est alors nommé secrétaire général de l'administration des hypothèques qu’il réforme avec efficacité.

S’ouvre alors la dernière phase de sa carrière militaire : sous le Consulat, il est réintégré (1800) avec le grade de général de brigade, il se distingue sur le Rhin et en Italie. Les fatigues, jointes à la faiblesse de l’âge, hâtent le terme de sa vie.

Quel destin singulier que celui de cet aristocrate, officier supérieur, artilleur créatif, démocrate, homme cultivé, passé à la postérité pour un seul ouvrage, tenu pour libertin, voire malfaisant, lui qui n’est ni l’un, ni l’autre. La gloire de l’œuvre a éclipsé celle de l’auteur tant elle est avant-gardiste : l’amour libéré de toute passion, la femme agissant à l’égal de l’homme, le plaisir jaillissant d’un jeu délibéré entre des personnages lucides et détachés. Révolutionnaire !